Dépenses entreprise
Tout savoir sur l'abattement pour frais professionnels

Grégoire Serre
Analyste financier
Mis à jour le
En fonction de la profession exercée par son salarié, l'employeur peut être autorisé à déduire un taux forfaitaire spécifique sur l'assiette des cotisations sociales à payer. Cet abattement a pour objectif de tenir compte des frais engagés pour leur activité. Quelles sont les nouvelles conditions de l'abattement pour frais professionnels et comment en bénéficier ? Mooncard fait le point.
Sommaire
Qu'est-ce que l'abattement pour frais professionnels ?
Un abattement pour frais professionnels, ou « déduction forfaitaire spécifique » (DFS), peut s'appliquer sur l'assiette des cotisations sociales de certaines catégories de salariés. En d'autres termes, l'entreprise est autorisée à calculer les charges sociales dues sur la rémunération de ce personnel à partir d'une fraction de son salaire, et non de son intégralité.
Définition de l'abattement pour frais professionnels
D'un taux compris entre 5 et 30 % selon la profession, cette déduction vise à compenser les frais professionnels engagés par le salarié pour l'exercice de son activité. Cela peut inclure à la fois :
- L'absence d'une prime habillage versée au salarié ;
- Les frais de repas (prise de repas sur le lieu de travail, pendant les déplacements...) ;
- Les frais d'hébergement ;
- Les frais de déménagement (changement de domicile dû à l'activité professionnelle) ;
- Les frais de transport (utilisation du véhicule personnel, autres déplacements...).
Conséquences sur les cotisations et les droits sociaux
Les cotisations allégées ont à la fois pour effet :
- D'augmenter le net à payer du salarié concerné, avec une diminution des prélèvements sur le brut – cela constitue donc une forme pratique d'indemnité et augmente le montant de ses revenus ;
- De réduire ses droits à la sécurité sociale en matière de chômage, indemnités journalières maladie, prévoyance ou retraite – dans la mesure où ces derniers sont calculés sur la base du salaire après abattement, et non de la paie réelle.
Cotisations concernées par l'abattement
L'application de l'abattement implique la prise en compte de la quasi-totalité des cotisations sociales au titre de la paie du personnel de l'entreprise, soit notamment :
- La cotisation maladie/maternité/invalidité/décès ;
- La cotisation d’allocation familiale ;
- La cotisation d’accident du travail ;
- Les cotisations vieillesse et la contribution solidarité autonomie (CSA) ;
- La contribution au fonds national d'aide au logement (FNAL) ;
- Le versement mobilité ;
- La taxe d'apprentissage ;
- La contribution à la formation professionnelle...
Plafond de la déduction forfaitaire spécifique (DFS)
La DFS est plafonnée à 7 600 € par an et par salarié. Ce plafond est fixe et n'est pas revalorisé annuellement. Il est important de noter que l'application de la DFS ne doit pas avoir pour effet de ramener l'assiette des cotisations en dessous du salaire minimum de croissance (SMIC).
Bon à savoir
La déduction forfaitaire spécifique (DFS) s'applique uniquement à certains métiers dans le cadre du régime fiscal des frais professionnels. Elle n'est pas liée à l'activité de l'entreprise, mais uniquement à la fonction du salarié.
Déduction forfaitaire de 10 % pour frais professionnels
Par défaut, l'administration fiscale applique une déduction forfaitaire de 10 % sur les revenus salariaux, destinée à couvrir les frais professionnels courants tels que les déplacements domicile-travail, les repas pris sur le lieu de travail ou l'achat de documentation personnelle. Cette déduction est automatiquement calculée lors de l'établissement de l'impôt sur le revenu. Pour chaque salarié, le montant de la déduction de 10 % s'élève :
- Au minimum, à 495 € sauf si la rémunération déclarée est inférieure à cette somme ;
- Au maximum, à 14 171 €.
Les salariés ont toutefois la possibilité de renoncer à cette déduction forfaitaire et d'opter pour la déduction de leurs frais réels, à condition de pouvoir justifier de ces dépenses.
Comparaison avec d'autres dispositifs d'optimisation fiscale
Outre la déduction forfaitaire spécifique, plusieurs mécanismes permettent d'optimiser les charges fiscales et sociales :
- Exonérations de charges : certaines primes ou indemnités peuvent être exonérées de cotisations sociales sous certaines conditions.
- Primes de frais : des primes spécifiques peuvent être versées pour couvrir certains frais professionnels, comme les primes de panier pour les repas.
- Indemnités forfaitaires : des indemnités peuvent être versées pour couvrir des frais professionnels, telles que les indemnités kilométriques pour les déplacements professionnels avec un véhicule personnel.
Il est essentiel de comparer ces dispositifs pour déterminer celui qui est le plus avantageux en fonction de la situation spécifique du salarié et de l'employeur.
Exemples concrets de calculs d'abattement
Exemple 1 :
Un salarié perçoit une rémunération annuelle brute de 45 000 € et appartient à une catégorie professionnelle bénéficiant d'un abattement de 25 %. L'employeur opte pour la déduction forfaitaire spécifique. La base de calcul des cotisations sera donc :
45 000 € - (25 % de 45 000 €) = 33 750 €.
Ainsi, les cotisations sociales seront calculées sur une assiette de 33 750 € au lieu de 45 000 €.
Exemple 2 :
Un salarié perçoit une rémunération annuelle brute de 30 000 € et engage des frais professionnels réels de 5 000 €. S'il opte pour la déduction forfaitaire de 10 %, l'abattement sera de 3 000 €. Il est donc plus avantageux pour lui de déduire ses frais réels, sous réserve de pouvoir les justifier.
Risques et contrôles URSSAF
L'application de la déduction forfaitaire spécifique doit être effectuée avec rigueur. En cas de mauvaise application, l'employeur s'expose à des risques de redressement lors de contrôles de l'URSSAF. Les points de vigilance sont les suivants :
- Justification des frais : l'employeur doit être en mesure de prouver que le salarié supporte effectivement des frais professionnels non remboursés.
- Accord du salarié : l'application de la DFS nécessite l'accord préalable du salarié, informé des conséquences sur ses droits sociaux.
- Respect des plafonds : l'abattement ne doit pas dépasser 7 600 € par an et par salarié, ni ramener l'assiette des cotisations en dessous du SMIC.
Quel est le montant de l'abattement pour frais professionnels ?
Le taux de l'abattement varie selon la profession afin de prendre en compte les différentes dépenses assumées par chaque métier. Dans tous les cas, l'application de l'abattement ne peut avoir pour effet :
- Ni de dépasser une limite de 7 600 euros bruts par année civile et par emploi dans l'entreprise ;
- Ni de ramener la base de cotisations sous l'assiette minimum de calcul des droits à la protection sociale, correspondant au SMIC.
Vous trouverez, ci-dessous, quelques exemples de taux de la déduction forfaitaire par profession, définis par l'article 5 de l’annexe IV du code général des impôts :
Artistes | |
---|---|
Musiciens, choristes, chefs d’orchestre, régisseurs de théâtre | 20 % |
Personnel de création de l’industrie cinématographique | 20 % |
Artistes dramatiques, lyriques, cinématographiques ou chorégraphiques | 25 % |
Assurances, secteur bancaire et immobilier | |
---|---|
Inspecteurs d’assurances des branches vie - capitalisation et épargne | 30 % |
Démarcheurs, négociateurs salariés | 30 % |
Négociateur immobilier | 30 % |
BTP | |
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Apprentis du bâtiment, agents de maîtrise ou cadres sur chantier | 10 % |
Ouvriers visés à l’article 1er du décret du 17 novembre 1936 ou embauchés par un particulier | 10 % |
Casinos et cercles | |
---|---|
Salariés français des casinos de Monaco | 20 % |
Personnel assumant des frais de double résidence | 12 % |
Personnel assumant simultanément les deux types de frais | 20 % |
Commerce et VRP | |
---|---|
Visiteur médical, délégué médical, représentant en spécialités pharmaceutiques | 30 % |
Ingénieur commercial | 30 % |
Chef du service des ventes de voitures automobiles | 30 % |
Voyageurs, représentants et placiers de commerce ou d’industrie | 30 % |
Finances | |
---|---|
Commis des prestataires de services d’investissement | 20 % |
Journalistes, secteur de la presse et de la publicité | |
---|---|
Journalistes | 30 % |
Ouvriers d’imprimerie de journaux travaillant la nuit | 5 % |
Ouvriers travaillant dans une entreprise d’affichage | 10 % |
Représentant en publicité | 30 % |
Transport | |
---|---|
Chauffeurs et convoyeurs de transports rapides routiers | 20 % |
Chauffeurs des entreprises de déménagement | 20 % |
Conducteurs-démonstrateurs et conducteurs-convoyeurs des entreprises de construction d’automobile | 25 % |
Propreté | |
---|---|
Salariés du secteur de la propreté (extinction progressive et suppression au 1er janvier 2029) | 8 % |
Le calcul de l'abattement pour frais professionnels doit assurer la prise en compte de l'ensemble des rémunérations, indemnités, primes et gratifications en brut. Cela inclut les éventuelles indemnités versées au titre du remboursement des frais professionnels, par exemple pour l'utilisation du véhicule personnel, la prise de repas à l'extérieur du lieu de travail, l'exercice de l'activité à domicile en télétravail...
Bon à savoir
Des conditions spécifiques de calcul et abattement des frais professionnels peuvent s'appliquer en fonction du statut de l'entreprise ou de celui du salarié. Renseignez-vous notamment sur les règles applicables :
- Pour un auto-entrepreneur ;
- Au sein d'une SASU (société par actions simplifiée unipersonnelle) ;
- Dans le cadre d'un portage salarial ;
- Pour les frais engagés en télétravail.
Comment bénéficier de l'abattement pour frais professionnels ?
Jusqu'à récemment, il existait une relative tolérance en matière d'abattement professionnel : les entreprises pouvaient appliquer la déduction forfaitaire spécifique (DFS) pour chaque salarié concerné, sans se soucier de la réalité des dépenses engagées par ces derniers. Le bulletin officiel de la Sécurité Sociale (BOSS) a cependant fait évoluer sa doctrine sur la question en 2021, en complétant le code général des impôts.
À compter du 1er janvier 2023, trois conditions cumulatives doivent être respectées :
- Le salarié bénéficiaire doit bien appartenir à une profession concernée par la déduction forfaitaire spécifique, à titre personnel – et indépendamment de l'activité principale de l'entreprise.
- Au-delà de son obligation de déclaration, l'employeur doit disposer de justificatifs démontrant les réels frais professionnels assumés par son salarié et dont il n'assure pas le remboursement.
- L'employeur doit avoir obtenu l'accord du salarié pour appliquer le dispositif. En effet, la déduction a aussi pour effet de réduire ses droits acquis à la sécurité sociale.
L'accord du salarié peut être obtenu d'une façon collective ou individuelle, c'est-à-dire soit :
- Par convention ou accord collectif du travail ;
- Après accord du comité social et économique (CSE) ;
- Après accord écrit du salarié, à renouveler tous les ans.
Évolution progressive de la DFS dans certains secteurs
Le BOSS (Bulletin officiel de la Sécurité Sociale) a initié une sortie progressive de la DFS pour huit secteurs d'activité, avec une réduction annuelle des taux d'abattement jusqu'à leur suppression totale. Les secteurs concernés, leurs taux au 1er janvier 2025 et les dates prévues de sortie sont :
- Propreté : 4 % - sortie prévue le 1ᵉʳ janvier 2029.
- Casinos et cercles de jeux : 6 % - sortie prévue le 1ᵉʳ janvier 2031.
- Construction : 8 % - sortie prévue le 1ᵉʳ janvier 2032.
- Spectacle vivant et enregistré (Catégorie 1) : 18 % - sortie prévue le 1ᵉʳ janvier 2032.
- Spectacle vivant et enregistré (Catégorie 2) : 21 % - sortie prévue le 1ᵉʳ janvier 2032.
- Transport routier de marchandises : 18 % - sortie prévue le 1ᵉʳ janvier 2035.
- Aviation civile : 27 % - sortie prévue le 1ᵉʳ janvier 2033.
- Journalistes : 26 % - sortie prévue le 1ᵉʳ janvier 2038.
- VRP (Voyageurs, Représentants et Placiers) : 26 % - sortie prévue le 1ᵉʳ janvier 2038.
Durant cette période transitoire, des tolérances sont accordées. Elles permettent notamment l'application de la DFS même en l'absence de frais professionnels réellement supportés, le cumul de la DFS avec le remboursement de certains frais professionnels, et une procédure de recueil du consentement des salariés plus souple.
Conséquences de l'abattement sur les droits sociaux
La DFS augmente le salaire net du salarié en réduisant l'assiette des cotisations sociales. Elle peut également diminuer certains droits sociaux, tels que les indemnités chômage, les prestations maladie ou les droits à la retraite. EN effet, ces derniers sont calculés sur la base du salaire après abattement.
Les nouvelles règles fixées par l'Urssaf et l'administration fiscale imposent un suivi strict de l'ensemble des dépenses professionnelles pour bénéficier du régime de l'abattement. La carte de paiement pour les frais professionnels proposée par Mooncard constitue une solution attractive et performante pour vous mettre en conformité fiscale. Réservez une démo dès maintenant et obtenez votre carte corporate !
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