Comptabilité
Créance irrécouvrable et douteuse : comment procéder ?

Yannick Agbohoun
Responsable Comptable
Mis à jour le
Toutes les entreprises ou presque sont confrontées un jour ou l’autre à des débiteurs défaillants. Cette situation est loin d’être exceptionnelle. La mise en place de procédures de recouvrement claires et précises ne suffit pas toujours à obtenir le paiement des factures impayées. Lettre de relance, mise en demeure, actions judiciaires n’empêchent pas l’apparition de créances irrécouvrables. Mais de quoi s’agit-il exactement ? Comment saisir dans votre comptabilité les créances douteuses et les factures irrécouvrables ? L’entreprise peut-elle malgré tout récupérer la TVA ? Mooncard répond à toutes vos questions en détail.
Sommaire
Toutes les opérations bancaires de votre entreprise doivent faire l’objet d’un enregistrement. Objectif : conserver une trace claire, précise et sincère des opérations commerciales, économiques et financières réalisées dans le cadre de son activité. Vous ne savez pas comment procéder ? Mooncard vous explique en détail comment enregistrer l’écriture comptable de banque.
Créance irrécouvrable et douteuse : définitions
Dans un premier temps, attardons-nous sur les définitions essentielles à connaître afin d’établir correctement la comptabilité de votre entreprise.
La notion de créance
Quand votre entreprise émet une facture, elle obtient une créance, c’est-à-dire un droit sur son client.
Pour être recouvrable, la créance doit remplir trois conditions cumulatives :
- Elle doit être certaine : son existence doit donc être incontestable ;
- Elle doit être liquide : le montant en devise de la créance doit être déterminé ou déterminable de façon objective et concrète ;
- Elle doit être exigible : la date de paiement est dépassée.
Si l’ensemble de ces conditions est rempli, vous êtes en droit de demander à votre débiteur le paiement de votre créance. Mais attention, celle-ci ne doit pas être prescrite. Par ailleurs, le client doit avoir été informé des conditions de paiement et de la date d’échéance.
La créance douteuse
Une créance devient douteuse lorsque son recouvrement paraît incertain. Ce risque peut découler d’une absence de réponse du débiteur à vos relances répétées. Son silence peut être interprété comme un refus tacite de s’acquitter de sa dette. Toutefois, pour qualifier un client comme douteux, il est indispensable d’adopter une approche plus mesurée et objective.
Dès les premiers signes de retard de paiement, il est judicieux d’utiliser un système de scoring. Ce système de notation, basé sur le score de crédit, permet d’évaluer la solvabilité du client. Un score faible, couplé à un historique de paiements irréguliers, alerte sur la probabilité d’un impayé. De plus, des indicateurs tels que la fréquence des retards et la durée de ces retards offrent des critères mesurables pour qualifier le risque.
Une créance douteuse se distingue également par des situations concrètes : un impayé persistant malgré une mise en demeure, l’état de cessation de paiement ou l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’encontre du débiteur. Ces éléments factuels doivent être confrontés à votre système de scoring pour prendre une décision éclairée. À ce stade, bien que la créance reste en péril, un paiement ultérieur peut encore intervenir.
Ainsi, la mise en place d’outils de mesure précis vous aide à anticiper et gérer ces risques de manière proactive.
Exemple de créance douteuse
Lors de la clôture de son exercice comptable, une société analyse ses comptes clients. Un de ses clients, en redressement judiciaire, suscite une préoccupation. La créance relative à ce client est de 15 000 € TTC.
Entrée initiale dans le compte :
Numéro de compte | Désignation | Montant | Débit | Crédit |
---|---|---|---|---|
416 | Clients douteux | 1500 € | ||
411 | Compte du client | 1500 € |
Étant donné la situation, le dirigeant décide d'adopter une démarche prudente. Si le non-recouvrement semble probable, une provision pour dépréciation est envisagée.
Écriture de provision partielle :
Pour cet exemple, le dirigeant estime qu'une provision de 80 % de la créance est nécessaire.
Montant de la créance TTC : 15 000 €
TVA (20 %) : 2 500 €
Montant HT : 12 500 €
Montant de la provision : 12 500 € x 80 % = 10 000 €
Numéro de compte | Désignation | Montant | Débit | Crédit |
---|---|---|---|---|
68174 | Dotations aux provisions pour dépréciation des créances | 10 000 € | ||
491 | Dépréciation du compte client | 10 000 € |
Les provisions pour dépréciation sont à revoir lors des exercices futurs. En fonction des évolutions (paiement de la créance ou confirmation de sa perte), des ajustements seront effectués.
La reprise de la provision s'effectue comme suit :
Numéro de compte | Désignation | Montant | Débit | Crédit |
---|---|---|---|---|
78174 | Dotations aux provisions pour dépréciation des créances | 10 000 € | ||
491 | Dépréciation du compte client | 10 000 € |
La TVA, à ce stade, reste non récupérable.
Pour récupérer la TVA d'une facture non payée, il est nécessaire d'adresser à votre client une copie de la facture originale, dotée de la mention :
« Facture restée non réglée d'un montant de … euros (hors taxes) et d'une somme de … euros (TVA) non déductible conformément à l'article 272 du CGI ».
Bon à savoir
Qu’est-ce que la créance litigieuse ?
Il s’agit d’une créance dont l’existence est contestée par votre client. Celui-ci va donc refuser le paiement de la facture concernée.
Distinction entre créance douteuse et créance litigieuse
La créance douteuse se caractérise par l'incertitude de son recouvrement, même si son existence et son montant ne sont pas contestés par le débiteur.
En revanche, une créance litigieuse est une dette dont l'existence ou le montant fait l'objet d'un différend avec le client. Ce dernier remet en question la validité ou l'exactitude de la créance, ce qui nécessite souvent une intervention juridique pour trancher le litige.
Dans le premier cas, l'enjeu réside dans l'anticipation et la gestion du risque de non-recouvrement, tandis que dans le second, il s'agit de résoudre un conflit pour déterminer la réalité de la créance.
La créance irrécouvrable
C’est en quelque sorte la dernière étape de la vie de votre créance. À ce stade, vous êtes certain que votre facture ne sera jamais réglée par votre client. L’ensemble des moyens de recouvrement ont en effet échoué.
Une créance doit ainsi être considérée comme irrécouvrable si son délai de prescription a expiré. Même conclusion si votre client a été placé en liquidation judiciaire et que les actifs disponibles n’ont pas permis le paiement de votre facture.
Créances douteuses et irrécouvrables : comment les comptabiliser ?
L’écriture comptable d’une créance varie selon si celle-ci est douteuse ou irrécouvrable.
La comptabilisation d’une créance douteuse
Pour enregistrer une créance douteuse dans votre comptabilité, vous devez :
- Inscrire le montant de votre facture au compte 416 - Clients douteux ou litigieux ;
- Inscrire le même montant au crédit du compte 411 - Comptes clients.
Vous devez ensuite comptabiliser une dépréciation totale ou partielle du montant hors taxe de votre créance. Votre choix dépendra de la probabilité que votre facture soit finalement réglée par le client. Pour cela, vous devez :
- Inscrire le montant hors taxe de votre créance au débit du compte 68174 - Dotation aux provisions pour dépréciation des créances ;
- Inscrire le même montant au crédit du compte 491 - Provisions pour dépréciation des comptes de clients.
La comptabilisation des créances irrécouvrables
Vos tentatives de recouvrement ont toutes échoué ? Dans ce cas de figure, il convient tout d’abord d’obtenir un certificat d’irrécouvrabilité.
Qu’est-ce que le certificat d’irrécouvrabilité ?
Le certificat d'irrécouvrabilité est un document officiel confirmant qu'une créance est irrécupérable. Ce qui permet à l'entreprise de la comptabiliser en perte et de récupérer la TVA correspondante.
Ce document vous permet de prouver :
- Le caractère irrécouvrable de votre créance ;
- De passer votre créance en perte dans votre comptabilité.
Pour cela, il est nécessaire d’inscrire :
- Le montant hors taxe de votre créance au débit du compte 654 - Pertes sur créances irrécouvrables ;
- Le montant de la TVA au débit du compte 4457 - TVA collectées
- Le montant toutes taxes comprises au crédit du compte 416 - Client douteux ou litigieux.
Par ailleurs, si vous avez enregistré une dépréciation de votre créance. Elle vous permet de prendre en compte la perte de valeur de votre créance dans votre comptabilité. Il convient donc :
- D’inscrire son montant au débit du compte 491 - Provisions pour dépréciation des comptes de clients ;
- D’indiquer ce même montant au crédit du compte 78174 - Reprises sur provision pour dépréciation de créances.
Comment obtenir un certificat d’irrécouvrabilité ?
Pour l'acquérir, l’entreprise doit consulter un avocat, un huissier ou un organisme de recouvrement. Si ces derniers ne parviennent pas à récupérer les montants, ils délivrent le certificat. Une entreprise peut également l'obtenir en cas de paiement par chèque volé. Pour récupérer la TVA, il faut envoyer un duplicata de la facture au client avec une mention spécifique. En cas de liquidation judiciaire, la TVA est récupérable dès la décision judiciaire.
Votre créance irrécouvrable est maintenant une charge pour votre entreprise. Elle sera alors déduite du résultat imposable à la fin de l’exercice comptable.
Quand solder une créance douteuse ?
Il ne suffit pas de constater qu’une créance est irrécouvrable lorsqu’on est certain qu’elle ne sera jamais payée. Il convient d’identifier des indicateurs précis et de définir des délais pour prendre une décision éclairée.
Délai de réponse du débiteur
Établissez un délai clair sans réponse de la part du client. Par exemple, si le débiteur ne répond pas à vos relances pendant plus de 90 jours, ce délai constitue un signal fort d’irrécouvrabilité. Ce seuil peut être ajusté en fonction de la nature de votre activité et du comportement historique de vos clients. De plus, l’absence prolongée de communication doit alerter sur la faible probabilité d’un paiement ultérieur.
Évolution de la situation juridique
L’évolution de la situation juridique du débiteur est également déterminante. Si une procédure judiciaire, telle qu’un redressement ou une liquidation judiciaire, est ouverte, le risque de recouvrement s’amenuise considérablement.
Dans ce cas, il est recommandé de solder la créance afin de préserver la santé financière de votre entreprise.
Autres indicateurs de solvabilité
D’autres critères mesurables viennent compléter l’analyse :
- Un historique de retards répétés ;
- La diminution du score de solvabilité ;
- Et des signes récurrents de difficultés financières doivent être pris en compte.
La décision de solder une créance douteuse doit s’appuyer sur une évaluation globale de ces indicateurs, éventuellement après consultation d’un expert en recouvrement ou d’un avocat spécialisé.
Si vous souhaitez sécuriser vos finances tout en restant vigilant face aux évolutions du dossier, adoptez cette approche proactive.
Créances irrécouvrables et douteuses : est-ce possible de récupérer la TVA ?
Si votre créance est seulement douteuse, il est impossible de récupérer la TVA. En revanche, cette possibilité est ouverte pour les créances irrécouvrables.
Pour cela, il est nécessaire :
- D’être en mesure de démontrer le caractère irrécouvrable de votre créance : pour constituer votre dossier, pensez à conserver tous les échanges avec votre débiteur (emails, lettres de relance, courrier de mise en demeure) ainsi que les différents actes de procédure judiciaire.
- D’envoyer au débiteur un duplicata de votre facture comportant la mention suivante : « Facture demeurée impayée pour la somme de ...... euros (prix net) et pour la somme de .... Euros (TVA correspondante) qui ne peut faire l’objet d’une déduction (CGI, art. 272) ».
Pour le suivi de votre comptabilité, il est à la fois difficile de tout prévoir, et nécessaire de mettre en place des process pour traiter les choses importantes telles que la gestion des créances. Il est donc primordial de dégager du temps pour ces tâches stratégiques et de se débarrasser des toutes celles qui ne le sont pas.
La solution Mooncard vous permet par exemple de gérer automatiquement l'ensemble des frais professionnels depuis le paiement avec une carte Mooncard by VISA, jusqu'aux écritures comptables automatisées sans ressaisie et la récupération simplifiée de la TVA. Pour en savoir plus, réservez votre démo !
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